Dans les années 1970-1980 de nombreuses revues de photos et/ou de dessins, souvent éphémères et pour certaines ne dépassant même pas le numéro 0, ont vu le jour. J'en ai conservé quelques unes, des séries incomplètes certes mais qui montrent la richesse de cette époque post-68.
ContreJour
Voici ce qu'en disait François Hebel à propos de l'exposition à la Maison Européenne de la Photographie en novembre 2012.
[...]Le journal Contrejour, fanzine underground et provocateur, avec son incontournable rubrique «Dégrafez vos paupières» accueillit dans ses pages les écrits de critiques et historiens comme Arnaud Claass, Annie Walther, Jacques Marchois, Carole Naggar, André Laude ou Jean-Claude Gautrand. Il fut bientôt suivi de Caméra International créé avec Gabriel Bauret et des Cahiers de la photographie avec Gilles Mora et Bernard Plossu. Claude Nori, entouré d’une équipe de professionnels, se démena sans cesse pour assurer aux auteurs une visibilité maximale, organisa des expositions et des événements pour accompagner les ouvrages, joua un rôle d’agitateur culturel indiscutable pour imposer cette nouvelle photographie en devenir.[...]
Pour en lire plus - Le site de Claude Nori
Disraeli, une expérience humaine en photographie
Publication surprenante voire inédite, exemple marquant de la photographie québécoise. Une œuvre constituée de 118 tirages photographiques format carré regroupés dans un livre non broché. Quatre photographes y ont participé: Claire Beaugrand-Champagne, Michel Campeau, Roger Charbonneau et Cédric Pearson, mis en page par Jorge Guerra fondateur du magazine OVO.
"Le premier dossier, Disraëli, Une expérience humaine en photographie (1972), est celui où l’on découvre le travail tout à fait caractéristique du style du Groupe d’action photographique des années 1970. Claire Beaugrand-Champagne avait passé un été à Disraeli, village des Cantons de l’Est, pour y illustrer ses habitants, à une période où le Québec se modernisait de plus en plus rapidement, avec en toile de fond la confrontation entre les valeurs des citadins et celles du monde rural." (Extrait de : viedesarts.com)
OVO
En dehors des revues françaises Photo, Zoom, PhotoReporter qu'on pourrait qualifier, au vu de leurs unes, de magazine de charmes (l'intérieur était plus riche), OVO au Québec se distingue par les sujets mis en avant dans la revue créée par Jorge Guerra, photographe portugais qui a dû fuir son pays pour avoir refuser de combattre les mouvements de libération en Angola, une des colonies portugaises et la photographe québécoise Denyse Gérin-Lajoie.
"Ils choisissent de concevoir leur publication autour de thèmes précis. Les femmes photographes, l’autoportrait, l’immigration, les prisons, les travailleurs de la Baie-James [...] Cette approche permet d’atteindre un public autre que les amateurs de photo et de sensibiliser la population aux enjeux qui l’entourent. D’autres volets ont un caractère didactique, comme les numéros historiques sur Lewis Hine, Walkers Evans, William Notman, les photographes de l’agence française VIVA, la photographie mexicaine et la Photo League de New York. Le Magazine OVO, reconnu au Québec et à l’échelle internationale, s’est consacré à la découverte de photographes locaux, entre autres, Serge Jauvin, Michel Saint-Jean, Claire Beaugrand-Champagne et Gabor Szilasi. De 1974 à 1982, OVO publie un total de 1715 photos, dont 1202 sont l’œuvre de photographes québécois et canadiens.
(
Extrait de : Jorge Guerra et le magazine OVO)
Le Magazine OVO arrêtera sa parution en 1989.
Je n'en ai que trois exemplaires: Le couple (Vol 12/49), Le portrait (Vol 13/50), Le fleuve (Vol 13/53)
Les livres
Époque prolifique aussi pour des livres sur des sujets peu traités à l'époque par la presse dite traditionnelle.
C'est le cas des immigrés dans "Les lois de l'hospitalité" avec, notamment, les photos d'Armand Borlant, un temps journaliste au service photo de Libération.
C'est le cas du "Journal d'une veuve de mineur" fait à la suite de la catastrophe de Fouquières-les-Lens en 1970 et qui reprend l'album de famille d'une des seize victimes, Jean-Pierre Antinori 21 ans, livre repris ensuite par des peintres comme Gérard Fromanger ou Guy de Rougemont. (Jeune Peinture/Jeune Création - Quand l'art prend le pouvoir)
C'est le cas avec le livre sur les ouvriers-horlogers de Besançon Les travailleurs de Lip 53 photographies, avec des photographes célèbres comme Henri Cartier-Bresson, Jean Lattès, Chris Marker, Claude Raymond-Dityvon, Jean-Marie Simonet ou moins connus comme Jean-François Grognard (co-fondateur de l'agence Fotolib).
C'est le cas avec "Les Gueules Noires" du collectif de photographes "Pol Gornek" nom qui fut pendant longtemps aussi la signature de mes photos dans Libération (nom repris ensuite par Gilles Luneau). Ce livre retrace la vie des mineurs en Angleterre avec les photos de Jean-François Grognard, en Lorraine avec les photos de Daniel Lainé, et dans le Nord avec mes photos.
Enfin dans mes archives, Murals per la Libertat, un livre de photographies de Pau Barceló sur les peintures murales en Catalogne édité peu à près la mort de Franco.
En dehors de la photo: Un regard moderne
Le groupe Bazooka (Kiki Picasso, Loulou Picasso, Olivia Clavel, Lulu Larsen, Jean Rouzaud), à la demande de Serge July et sous l'impulsion d'Alain Bizos, sont intervenus à la dernière étape de la fabrication du journal Libération en détournant ou redessinant directement sur les pages les photos sélectionnées par la maquette. Polémiques et coups de poings parsèmerons le parcours des Bazooka dans les locaux de la rue de Lorraine en 1978. J'enlevais des pages les photographies que certains reporters-photographes ne voulaient pas voir "retouchées" et je payais une pige aux photographes dont la photo était passée entre les mains des Bazooka.
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