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Le voyageur et sa valise 

 

Chut! N’avez-vous pas entendu?

Je crois qu’à la porte, on a frappé.

Ne bougez pas et restez attablés,

Je vais de ce pas vous dire ce que j’ai vu.

 

Ah! Bonté divine, j’aurais donc eu raison!

Playa Sol, Rocamar, tous sont fermés.

Cette porte qui s’ouvre, c’est la première maison,

Qui, par cette nuit glaciale, ose m’inviter.

 

D’où venez-vous, monsieur le voyageur?

Une démarche hésitante, vous semblez épuisé.

Mais entrez je vous prie dans mon humble demeure.

Venez avec nous, nous en sommes au dîner.

Dans cette ville endormie, j’ai heurté tant de portes.

J’entends qu’on s’active et qu’on me crie ¡holà,

Puis quelques mots dans une sorte de patois.

Et toujours renvoyé tel un vieux cloporte.

 

Mais, pardonnez mon désordre. Excusez mon audace.

Voilà bien une famille toute entière assemblée

Tous ces mets sur la table et cette oie bien grasse.

Avec un jour d’avance, déjà, Noël serait-il fêté?

 

Quelle lourde valise dans la main d’un pauvre hère.

Enlevez votre manteau,

Et posez là votre chapeau.

Allons pas de chichis, posez-la donc à terre.

 

Ma valise vous intrigue. Que peut-elle receler?

Une vie toute entière. Ou quelques vieux papiers.

Souvenez-vous seulement qu’on ne peut tout garder,

Et qu’on ne peut pas vivre oublieux du passé.

 

C’est vrai qu’elle est amusante.

Tant d’étiquettes collées,

Tant de villes visitées.

Ouvrez-la donc! Ne nous faites plus attendre!

 

Vous voulez savoir ce qu’elle contient?

Juste des souvenirs d’un temps peu éloigné.

Des cadeaux, dites-vous pour un Noël chrétien?

Non, quelques babioles. Mais rien pour vous froisser.

 

Ouvrez-la! Ouvrez-la! Dépêchez-vous!

Le repas refroidit.

Bientôt plus de bougie.

Allons, allons du courage! Nous somme à bout!

 

Vous la voulez vraiment? Vous voulez vos souvenirs?

Contre un peu de soupe,

Si ce n’est vous trahir,

J’en fais don volontiers à toute votre troupe.

 

Y aurait-t-il parmi vous

Une personne assez sage

Qui garderait le tout

Pour en faire bon usage?

 

Vous? Je vous la laisse enfin.

Je repars dans la nuit.

Et pour calmer ma faim,

Je vous prends ce biscuit.

 

Cadaqués - Décembre 2012

 

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